Définir la poésie est une entreprise interminable, tant il est vrai qu’elle excède toujours ce qui pourrait la circonscrire. Elle n’est réductible ni à une forme, ni à un genre, ni même à un ton ou des thèmes particuliers. Aussi la meilleure façon d’aborder la poésie est-elle encore d’en lire, de toutes époques et de toutes formes, ou même, mieux encore, d’en écrire. Jean-Michel Maulpoix vient de publier, en mars dernier, un petit ouvrage intitulé Les 100 mots de la poésie, dans la célèbre collection « Que sais-je ? » des Presses Universitaires de France. Un livre précieux pour tous ceux qui voudraient découvrir la poésie moderne et contemporaine.
Un guide pour aborder la poésie
Il est beaucoup de lecteurs qui ne lisent pas, ou très peu, de poésie. Y compris, d’ailleurs, des gros lecteurs, dévoreurs de romans, de biographies, de polars, de mangas, d’essais. Cela tient sans doute au fait qu’on ne lit pas de la poésie comme on lirait un roman : les recueils de poésie ne sont pas forcément faits pour qu’on les lise in extenso du début à la fin. C’est une lecture butineuse, au gré des envies et des moments, où l’on papillonne d’un poème à l’autre, en se laissant impressionner par la force des mots.
C’est aussi, sans doute, que la poésie fait un peu peur. Même si cette mythologie est un peu usée aujourd’hui, il reste quand même, peu ou prou, l’idée que le poète est une sorte de magicien des mots, capable de nous entraîner en dehors de notre zone de confort, de nous révéler un univers parfois insolite, et de nous en apprendre sur nous-mêmes. Peut-être certains voient-ils la poésie comme un monde difficile à aborder.
Aussi un guide comme Les 100 mots de la poésie est-il particulièrement utile pour les néophytes, et je suis convaincu qu’il intéressera aussi les connaisseurs. Le choix d’une présentation par mots-clefs permet d’éviter la forme peut-être un peu austère de l’essai traditionnel. Le lecteur pourra ainsi choisir lui-même l’ordre dans lequel il entend s’aventurer dans la découverte de la poésie. Les articles sont plutôt courts (une page ou deux) et livrent une réflexion à la fois précise et abordable sur quelques uns des concepts centraux de la poésie.
Un dictionnaire amoureux
Loin de se réduire à une liste de concepts techniques, les mots retenus par Jean-Michel Maulpoix dessinent une lecture personnelle de la poésie. L’ouvrage tient donc moins d’un traité de poétique que d’un « dictionnaire amoureux », donnant à lire une conception de la poésie.
De fait, on retrouve quelques-uns des concepts centraux de la pensée de Jean-Michel Maulpoix, telle qu’elle s’est affirmée à travers de nombreux essais depuis La Voix d’Orphée, paru aux éditions José Corti en 1989. On ne s’étonnera donc pas de trouver un article « lyrisme », un article « critique », un article « lien », un article « élégie »… Mais le poète n’a évidemment pas réduit le livre à n’être qu’une simple vitrine de ses autres ouvrages. Si le choix est subjectif, il livre cependant une approche approfondie de la poésie.
On retrouve aussi, au fil des articles, différents noms de poètes qui esquissent les affinités poétiques de Jean-Michel Maulpoix. Baudelaire, Rimbaud, Apollinaire, Ponge, Michaux, sont des noms qui reviennent assez souvent. Mais aussi Claudel, Mandelstam, Verlaine, Deguy, Celan… et tant d’autres. Le poète emprunte finalement ses exemples à toute l’histoire de la poésie, et n’hésite pas à remonter aux sources antiques, grecques et latines, de la poésie, sans se limiter à la poésie moderne et contemporaine.
Ce que je trouve intéressant dans ce livre, c’est aussi la présence d’entrées un peu inattendues. À côté de « alexandrin » et de « enjambement », il y a par exemple aussi un article « fontaine », traitant des sources d’inspiration, de la fontaine de Ronsard et de la soif de Rimbaud, ou encore un article « ignorance ». Jean-Michel Maulpoix nous fait ainsi profiter de son immense culture et parvient à transmettre sa passion pour la poésie.
Je ne peux donc que recommander cet ouvrage, qui intéressera non seulement les néophytes, mais aussi aux connaisseurs qui souhaiteraient approfondir un point particulier.
Je voudrais terminer en relevant une phrase extraite de la préface, que je trouve non seulement très belle, mais aussi très juste : « La poésie est moins faite pour aboutir à un beau livre que pour nous rendre à la vie même. » Contre Mallarmé, Jean-Michel Maulpoix réaffirme le caractère vital d’une poésie qui ne soit pas coupée du monde, mais qui nous éclaire sur ce monde et nous aide à y vivre.
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Merci !
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Très intéressant, je mets sur ma liste (ou tour de Pise ) à acquérir..
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