Les bandelettes de la conjugaison

Parmi les nombreuses propositions d’activités pédagogiques qui m’ont été soumises pendant ma formation d’enseignant, j’ai été séduit par les bandelettes de la conjugaison. L’idée est de permettre aux élèves d’observer par eux-mêmes les régularités, en leur offrant la possibilité de les rendre très visuelles. Je vous explique aujourd’hui de quoi il s’agit.

L’imparfait et le futur

Cette année, dans ma classe de CE2/CM1, j’ai décidé de traiter l’imparfait et le futur de façon concomitante, de manière à faire apparaître de façon claire que l’on peut s’appuyer sur des régularités communes à ces deux tiroirs verbaux, et de mettre en évidence la présence de marqueurs spécifiques, à savoir les voyelles -i- et -ai- pour l’imparfait, et la consonne -r- pour le futur.

L’intérêt de cette démarche est qu’elle permet de changer un peu la façon de faire, par rapport à d’autres approches plus traditionnelles, et ainsi de maintenir la motivation des élèves pour des apprentissages qui, du CE1 au CM2, sont très semblables, même si bien sûr la difficulté va croissant.

Je précise que, auparavant, les élèves ont travaillé sur l’identification du verbe, sur les notions d’infinitif, de radical et de terminaison, ainsi que sur les régularités communes à tous les tiroirs verbaux (période 1) avant de s’intéresser spécifiquement au présent de l’indicatif (période 2). En ce qui concerne le présent, je vous renvoie à un article antérieur.

Une semaine de découverte

Ma séquence a inclus plusieurs séances de découverte, puisqu’il s’agissait à chaque fois de découvrir une personne différente. La démarche était à chaque fois la même :

  • les élèves lisent un petit texte ad hoc,
  • ils soulignent les verbes (lors de la première séance, ils sont déjà soulignés) ;
  • ils recopient les verbes dans des cases ;
  • ils écrivent les sujets dans les espaces prévus à cet effet ;
  • ils colorient les terminaisons similaires de la même couleur.
Aperçu du travail d’un groupe d’élèves (image personnelle)

L’ordre dans lequel les personnes ont été abordées était le suivant :

  • séance 1 : ils/elles
  • séance 2 : nous et vous
  • séance 3 : tu
  • séance 4 : je
  • séance 5 : il/elle

Il va de soi que cela ne m’a pas pris cinq semaines, mais deux. En effet, je propose généralement en étude de la langue des « séquences massées », certaines semaines étant davantage orientées vers la conjugaison que vers la grammaire, l’orthographe ou le vocabulaire, et inversement. Je trouve cette façon de faire beaucoup plus efficace.

La mise en commun permet d’institutionnaliser les terminaisons qui sont alors écrites au fur et à mesure dans une leçon qui est complétée à chaque fois :

Une leçon à compléter au fur et à mesure (image personnelle)

Faciliter la mémorisation des terminaisons

Les élèves écrivent d’abord dans les bandelettes avant de les découper
(image personnelle)

Cette façon de faire prend pas mal de temps, d’autant plus que les élèves ont beaucoup de mal à coller de façon correcte les bandelettes. Je ne pensais pas que cela allait être l’obstacle principal rencontré par les élèves. L’idée même d’aligner les bandelettes par la droite, de façon à faire apparaître les terminaisons communes, ne leur est pas du tout naturelle. Certains élèves, y compris en cycle 3, rencontrent des difficultés à découper et coller de façon précise. C’est précisément tout l’intérêt de refaire cinq fois cet exercice : l’objectif est que tout le monde y arrive la cinquième fois. Cela constitue, en somme, une forme de différenciation invisible : certains élèves y arrivent dès la première séance, d’autres à la cinquième. Tous, en revanche, se sont pris au jeu. Certains élèves en difficulté m’ont dit qu’ils aimaient cette activité. D’autres, généralement difficiles à canaliser, se sont montrés très paisibles à ce moment. Je crois que c’est là l’intérêt de passer par une activité qui sollicite d’autres intelligences que celles les plus fréquemment sollicitées à l’école. En repérant eux-mêmes les régularités, les élèves mémorisent les terminaisons de façon plus facile.

La suite de la séquence en quelques mots

Bien sûr, une fois que l’on a fait ça, on est loin d’avoir fini. Le passage par des exercices plus traditionnels permet de s’entraîner à manipuler ces formes régulières de l’imparfait et du futur. Après une évaluation de mi-parcours permettant de vérifier la bonne mémorisation de ces formes, on en viendra aux verbes que je n’appellerais pas irréguliers à proprement parler, mais qui présentent des particularités orthographiques :

  • au futur, les verbes en -ier, -ouer, etc., dont le radical se termine par une voyelle et qui, par conséquent, comportent un e muet : je jouerai et non *je jourai ;
  • au futur encore, la transformation du y de l’infinitif en i dans les verbes en -ayer, -oyer, -uyer (je balaierai, j’aboierai, j’appuierai…) ;
  • au futur toujours, le doublement de certains r (ex. : je courrai, je verrai…) ;
  • à l’imparfait, la présence d’un double i (l’un appartenant au radical et l’autre à la terminaison) dans des verbes comme nous skiions.

Bien entendu, le travail sur ces particularités orthographiques est aussi une occasion de revoir les régularités.

*

J’espère que cet article vous aura intéressés. Je souhaiterais conclure en remerciant Mme Nathalie Leblanc, conseillère pédagogioque départementale spécialisée dans la maîtrise de la langue et formatrice à l’INSPE de Nice, pour ses propositions d’une grande richesse et pour son enthousiasme communicatif. C’est d’elle que je tiens l’idée des bandelettes de la conjugaison et la démarche associée, et je la remercie car les élèves se sont montrés très investis grâce à ce dispositif.

Image d’en-tête : Pixabay. Images du corps de l’article : images personnelles.

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4 commentaires sur « Les bandelettes de la conjugaison »

  1. C’est système un peu similaire (moins évolué) que ma maîtresse Lme Driancourt utilisait lors de mon CP en 1976. Nous avions chacun deux petites boîtes : une avec des mots ET des conjonctions, l’autre avec des verbes conjugués. On construisait des phrases avec ça. On lisait avant de savoir écrire avec ce système. C’est la pleine période « méthode globale », donc je ne suis pas sûr qu’elle axait comme toi sur les terminaisons verbales (tu remarqueras que je fais parfois des inversions de terminaison, ais à la place de ai par exemple, parce que pour moi ça n’a aucune importance).
    En fait, on travaillait des phrases type, facilement reconnaissable dans un texte ET qui permettent de lire très rapidement (+de 100 pages/h), de balayer un texte en travers ET en saisir le sens.

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