École : pourquoi j’ai changé mes rituels du matin

Des rituels à l’école ? Rien de bien mystique là-dedans. Dans le jargon de l’éducation nationale, cela désigne une petite routine du matin, une sorte d’échauffement intellectuel avant le commencement des autres activités. Un travail de révision très similaire d’un jour à l’autre, d’où cette appellation. Aujourd’hui, je vous explique pourquoi j’ai tout changé à mes rituels, et pourquoi j’ai très bien fait.

Mon ancien fonctionnement

À vrai dire, j’étais au départ assez fier de mon ancien fonctionnement. Je trouvais qu’il s’agissait d’un bon support de révisions, tout en fournissant aussi un apport culturel, et de quoi susciter la curiosité intellectuelle des élèves.

Chaque jour, quand les élèves entraient en classe, le vidéo-projecteur était déjà allumé, et leur permettait de se mettre immédiatement au travail. L’idée était qu’ils retrouvent d’emblée une posture d’élève, dès le seuil de la classe franchi. Ils devaient résoudre, sur leur ardoise, l’énigme projetée.

Le rituel était pensé sur quatre jours :

  • Le lundi, il s’agissait d’une devinette orthographique : les élèves devaient répondre à une question du type « Je suis bleue, suis-je la mer ou le ciel ? » Bien entendu, de semaine en semaine, les énigmes se complexifiaient.
  • Le mardi, la question posée était une énigme mathématique, consistant souvent en un petit problème de calcul mental, ou autre.
  • Le jeudi, je projetais un tableau célèbre (ou une sculpture, bref, une oeuvre entrant dans le champ des arts visuels). Les élèves devaient répondre à une question ouverte, par exemple donner un titre au tableau.
  • Le vendredi, je proposais une énigme scientifique. Par exemple, une photo de balance de Roberval, en demandant quelle masse il manque pour qu’elle soit à l’équilibre. Ou encore, une photo de planète que les élèves devaient nommer. Et caetera.

Ce rituel se voulait assez bref. Les élèves avaient le temps que je fasse l’appel et que je règle les éventuels problèmes administratifs (mots des parents, etc.) pour réfléchir à l’énigme. La mise en commun venait ensuite.

Ayant eu presque chaque année des cours multiples (CE1-CM1, CE1-CM2, CE2-CM1), je divisais l’écran en deux pour proposer deux niveaux de difficulté.

Pourquoi ça ne marchait pas si bien que ça

J’étais au départ assez satisfait de ce rituel. Il y avait de la différenciation, de la culture, des questions ouvertes… L’ensemble était à la fois intéressant et assez ludique. Pourtant, j’ai fini par constater que ça ne marchait pas si bien que ça.

Le fait de devoir travailler sur l’ardoise était un premier problème : au fur et à mesure que l’année avançait, un nombre croissant d’élèves venait à manquer du matériel nécessaire. Et ceux qui n’avaient pas de feutre effaçable, au mieux, réclamaient du matériel de rechange, au pire se détournaient de l’activité.

Un certain nombre d’élèves ne prenaient pas suffisamment le temps de réfléchir aux énigmes. Il suffisait que celles-ci demandent un peu de réflexion pour qu’ils la jugent infaisable, et ils se contentaient d’attendre la correction.

D’autres avaient trouvé la réponse en deux temps, trois mouvements, et avaient donc le temps de se dissiper avant que n’arrive le moment de la mise en commun.

Mes nouveaux rituels

J’en suis donc venu à changer radicalement mes rituels. J’ai cherché, précisément, à augmenter leur côté ritualisé : la tâche devait être davantage identique d’un jour à l’autre, pour que les élèves sachent exactement ce qu’ils ont à faire. Dans mon ancien rituel, les choses étaient trop ouvertes et changeantes d’un jour à l’autre.

J’ai aussi voulu que les élèves travaillent davantage à l’écrit. J’ai donc abandonné l’ardoise et la projection au profit d’une petite fiche au format A6, à coller en haut d’une page du cahier d’autonomie, avec pour consigne d’écrire en dessous.

Chaque jour, les élèves doivent renseigner diverses rubriques :

  • Dans un premier temps, ils écrivent en italien la date du jour, de la veille et du lendemain, et écrivent le temps qu’il fait. Auparavant, ce travail était fait au tableau par un élève responsable. Désormais, tout le monde s’entraîne à écrire la date, sachant que la date du jour est écrite en français au tableau.
  • Il y a ensuite, dans un deuxième temps, une énigme orthographique qui est désormais du même type chaque jour : il s’agit de « la phrase donnée du jour ». Les élèves doivent justifier l’orthographe de tous les mots de la phrase, ou seulement des mots soulignés si la phrase est longue ou que je souhaite attirer leur attention sur un point particulier.
  • Il y a ensuite, dans un troisième temps, une énigme mathématique. Il s’agit du jeu « le compte est bon ». Un nombre est donné, et les élèves doivent trouver comment l’atteindre avec des calculs utilisant les nombres donnés ensuite.
  • Enfin, pour terminer, il y a un mot en italien à dessiner. Cela demande de se souvenir de précédentes leçons, parfois éloignées dans le temps.

Résultats

Je me réjouis chaque jour d’avoir fait évoluer mes rituels. Ce moment est désormais certes plus long, mais plus agréable aussi. Les élèves sont vraiment investis. Le travail n’est pas plus facile, mais il est plus clair, au sens où les élèves savent exactement ce qu’ils ont à faire, car ce qui est demandé varie beaucoup moins d’un jour à l’autre. Les élèves veulent tous être celui qui résoudra les énigmes en premier. Ils essaient vraiment de chercher, en particulier pour « le compte est bon ». Ils voient aussi davantage l’intérêt qu’il y a à progresser en calcul mental. Ils s’appliquent davantage car ils travaillent à l’écrit dans un cahier qui laisse une trace de ces énigmes quotidiennes. Et cela ne fait pas pour autant des corrections en plus pour moi, car il s’agit d’un cahier de brouillon. Cela fournit ainsi une utilité supplémentaire au cahier d’autonomie auparavant utilisé presque seulement pour les activités autonomes prévues pour les élèves ayant fini en avance. Je suis donc très satisfait de ce nouveau fonctionnement qui implique beaucoup plus les élèves et qui améliore tout à la fois leurs résultats individuels et l’ambiance des débuts de journée en classe. C’est pourquoi j’avais envie de partager cela avec vous.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Que vous soyez enseignant, parent d’élève ou ancien élève, n’hésitez pas à donner votre avis dans l’espace des commentaires !

L’image d’en-tête provient de la banque d’images gratuites de WordPress.

25 commentaires sur « École : pourquoi j’ai changé mes rituels du matin »

  1. J’apprécie énormément cette idée de routine, échauffement intellectuel. Enseignant le français en collège, je ne dispose que d’une séance d’une heure. Mais je vais réfléchir à comment adapter cela à ma pratique pour être rapide et efficace, penser au support, à l’organisation matérielle qui semble être un point important dans la réussite de l’entreprise.
    A considérer pour la rentrée prochaine… mais l’essayer peut-être d’ici la sortie.

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  2. Intéressant 🙂 au collège et en cours de français certains collègues se cantonnaient à la phrase du jour 🙃. Quant j’étais moi même collégienne notre professeur de sciences physique nous faisait effectuer des exercices physiques et respiratoires avant de commencer son cours. Prof j’avais des rituels mais ponctuels par exemple sur le temps de la semaine des poètes par exemple un poème en arrivant ou pendant la séquence sur les contes un conte en sortant. Mon rituel traditionnel : accueil individualisé des élèves et tout le monde debout en silence avant de commencer. Ça me semble loin maintenant 😅

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  3. Je viens de lire l’article et je constate le même problème avec l’ardoise : ils n’ont jamais leur matériel et attendent donc que l’activité se termine.
    Chaque matin, ma classe a divers rituels qui ont suivi une progression au cours de l’année. Nous y passons 1 heure. Cela paraît long mais au final ces rituels me permettent de ne plus aborder certains thèmes dans les créneaux de maths et de français. Les élèves aiment beaucoup ces moments et savent exactement ce qui est attendu chaque jour.

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  4. Moi j’ai repris l’idée de rituels faits avec mes enseignants quand j’étais enfant : ils coupaient une feuille A4 seyes en 4. On avait 1/4 de feuille. Dessus, nous faisons une phrase de dictée, mots invariables et 2 verbes à conjuguer. Sur un autre quart, on récite 2 tables et un fait 2 opérations (s’il y a des multiplications ou divisions, c’est avec les tables du dessus) et un petit problème. Ça se corrige vite.
    Des fois, il m’arrive de faire ça sur le cahier du jour….

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  5. Malheureusement, une simple expérience personnelle ne suffit pas à déclarer que les rituels marchent ou pas. Il est indispensable de réaliser une étude scientifique pour affirmer des choses.
    Les rituels dans ma classe sont une sorte d’évaluation, de test. C’est l’outil le plus efficace qui soit pour faire progresser les enfants.
    Je recommande grandement de lire le bouquin The visible learning de John Hattie. On y balaye toutes les techniques d’apprentissage et ce qui ne sert à rien. Ça évite d’essayer de réinventer la roue qui risque de moins bien tourner.

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  6. J’ai des CP et je pense que les rituels du matin doivent évoluer chaque période… Moi, je commence par la date à l’oral et comptage absents-présents, filles-garçons; etc. Puis période suivante, écrire la date d’hier aujourd’hui demain sur ardoise puis cahier, période suivante les mois de l’année, période suivante écrire une phrase ou deux de la prochaine poésie tous les matins,etc …voilà pour ma petite contribution ….

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  7. Les rituels sur ardoise ou fiche plastifiée ne me conviennent pas. Ça ne laisse pas de traces écrites pour eux, et l’écriture au feutre d’ardoise n’est pas la même qu’au crayon ou stylo.

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  8. Je fonctionne également ainsi avec des phrases ritualisées en anglais, une analyse grammaticale plus une transformation de phrase, un calcul chronométré ou énigme numérique. Cela fonctionne très bien.

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    1. Certes, mais il y a d’autres moments pour s’en occuper, et globalement je trouve un très grand regain de motivation avec ce nouveau système. Même les élèves aux compétences fragiles essaient de trouver une solution, et cherchent avec motivation.

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      1. Ce site en français résume bien le livre.
        C’est un regroupement Il y a plusieurs étapes:
        Les Salutations
        Le Partage ( quoi de neuf qui peut évoluer en petit exposé )
        Activité de groupe ( on peut faire des jeux ice breaker en début d’année et de révision par la suite par exemple…)
        Message ( pour marquer une activité ou un événement attendu ds la journée..)
        Quand j’étais aux USA c’était la routine de la GS au
        CM2 et apparemment au collège aussi.
        http://danslemondeduneptiteprof.blogspot.com/…/the…

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  9. Est ce que les rituels sont forcément en début de journée ? Est ce que ça ne peut pas être juste quelque chose qui se fait régulièrement ? Est ce que les rituels correspondent à un apprentissage ? Je me suis fait taper sur les doigts par ma pemf en début d’année car je faisais en début de journée un rituel sur le nombre (un nombre donné à écrire en lettres, en chiffres, à replacer dans un tableau de numération, à décomposer additivement…) et un rituel en français (le jour de la visite c’était une grille de mors mêlés reprenant du lexique étudié autour du temps qui passe à la fois en français et en QLT), d’autres fois c’était chercher un mot dans le dictionnaire ou phrase du jour ou devinette autour du thème de la lecture suivie ou du projet…. Du coup, j’ai fait comme elle voulait (mon but c’était d’être titularisée cette année 😅) et ça me questionne toujours plusieurs mois après… Pourquoi ce n’était pas bien ce que je proposais ? J’avais une progression, c’était de l’entraînement sur une notion étudiée à ce moment là, je pensais que ça permettait de fixer les apprentissages pour certains élèves qui avaient besoin qu’on répète, besoin de s’entraîner etc.

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  10. Bcp de rituels, qui évoluent avec leurs connaissances et qui introduisent ou consolident les notions étudiées. En F, dictées de lettres , puis syllabes, puis encodage de mots, lettres à remettre dans l’ordre pour former un mot, anagrammes. En EDL, trouver l’intrus dans une liste de mots, travailler les inférences en lecture, trouver le mot étiquette . En maths, dictée de n’ombres, ranger les n’ombres dans l’ordre, la fleur des n’ombres, dessiner les nombres, les décomposer, le tableau des nombres , les euros, des calculs, les compléments à…,les problèmes. En gros, 1 rituel maths et 1 français par jour( des fois 2 quand ils sont à l’aise) , tout ça pendant 40 min environ sur ardoise. Ça change chaque jour , 8 rituels par semaine que je garde en gros sur la période. Les enfants adorent et moi aussi. Je les vois progresser et pas de cahiers à corriger.

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  11. Je faisais le réveil des neurones à partir du CE1, qui, selon le jour, permettait de rebrasser des connaissances en français, maths, hist/géo…en fonction de ce qu’on avait vu, de ce qu’on allait faire dans la journée. C’était des devinettes, textes à trous, écriture de phrases/mots, sous forme de petits jeux… Ça permettait des les poser en arrivant et de les mettre en activité de façon ludique.
    Je faisais ça de 8h20 à 8h45, les élèves entraient en classe tôt donc ça ne prenait pas trop de temps et j’avais la paix pour l’appel/cantine/étude😉

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  12. Je propose des rituels chaque matin avec une progression par période. Tout se fait sur le cahier du jour et les élèves aiment beaucoup ce moment de la journée. Ils attendent avec impatience les nouveaux rituels à chaque période. La répétition des consigne facilite la mise en oeuvre pour ceux qui sont le plus en difficulté. Et j’ai pu observer une belle progression sur l’année. C’est d’ailleurs à partir de ça que je peux, entre autre, les évaluer.

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