En complément à mon article sur les Rectifications de l’orthographe, je souhaiterais aujourd’hui vous parler du mot « oignon », concerné par cette réforme.
Des oignons à toutes les sauces
Comme l’indique le Dictionnaire historique de la langue française, le mot est « issu du latin unionem, accusatif de unio, unionis “oignon sans caïeux”. Il s’agit d’un mot dialectal, le terme courant étant caepa » (ce dernier ayant donné ciboule et l’italien cipolla). L’anglais onion vient du français.
Le Dictionnaire historique indique plusieurs graphies en ancien français : unniun, hunion, oingnun, ognon et enfin notre oignon. La graphie oignon n’est donc qu’une étape au terme d’un long processus qui a vu apparaître différentes écritures. Aussi la proposition de rectifier l’orthographe de oignon en ognon n’est-elle pas totalement aberrante, et peut même s’appuyer sur des graphies anciennes. Cependant, il est également vrai qu’il n’est guère plus difficile d’écrire oignon qu’ognon. Affaire à suivre, donc…
La cuisine orthographique de l’Histoire
Il faut en effet souligner que la notion d’orthographe est relativement récente, au sens où les mots n’ont pas toujours été fixés de manière stable. Rappelons que la langue française, en majorité issue du latin, est l’aboutissement d’une longue évolution phonétique. Les différentes graphies peuvent alors refléter certaines étapes de cette évolution, ou bien incarner le souhait de revenir à une graphie plus proche de celle de l’étymon.
Le son [ɲ] (écrit ñ en espagnol), que nous écrivons aujourd’hui gn, s’est autrefois écrit ign. Vous trouverez sur le forum « études littéraires » une réflexion collective sur ce phonème. On y trouve notamment un fac-similé d’une page d’un texte du XVIe siècle, où l’on voit cohabiter, à quelques lignes de distance, les graphies aigneau et agneau, toutes deux prononcées [aɲo]. De même pour campaigne et campagne.
(Image d’en-tête : des bulbes d’oignon, Public Domain Pictures, Pixabay)