Je voudrais aujourd’hui vous faire découvrir un poète québécois. William Chapman, né en 1850 et mort en 1917, est notamment l’auteur de « L’année québécoise », dans Les Fleurs de Givre, où le poète célèbre successivement les différents mois de l’année. Je vous propose de découvrir « Janvier », où le poète chante en alexandrins réguliers les rigueurs de l’hiver canadien comme la chaleur fraternelle des Québécois. C’est sans doute un peu trop grandiloquent, mais ça n’en reste pas moins un très beau poème.
Il fait froid. Les blizzards soufflent, et nul rayon Ne dore des forêts les blancheurs infinies ; Mais Noël sur nos seuils laissa comme un sillon De clartés, de parfums, de paix et d’harmonies. Et sur l’épais verglas des chemins boulineux, Sur les trottoirs glissants et clairs comme l’agate, Dans les logis obscurs, sous les toits lumineux, L’allégresse loquace et tapageuse éclate. En vain la neige à flots tombe des cieux brouillés, En vain le grand réseau polaire nous enlace, En vain le fouet du vent nous flagelle la face, Nos cœurs ont la chaleur des bords ensoleillés. Nos cœurs français n’ont rien des froideurs de la bise Qui tord l’arbre souffrant et mort presque à moitié, Et nous nous enivrons de la senteur exquise Qu’épanche sur nos fronts l’arbre de l’Amitié. Ce vif rayonnement de joie en tous sens brille Et glisse jusqu’au gîte isolé du colon. Aux tables des fricots le sel gaulois pétille, Et tout un monde gigue au son du violon. Les somptueux salons sont ruisselants de flammes, Et sous le flamboiement des lustres de cristal, Comme un écho divin, la musique du bal Emporte en ses replis prestigieux les âmes. Dans tout cercle du soir plus vive est la gaîté, Pendant que sur les toits sanglote la rafale, Ou qu’au ciel éclairci l’aurore boréale Déroule les splendeurs de son voile enchanté.
William Chapman, « Janvier », dans « L’année canadienne »,
lui-même paru dans Les Fleurs de Givre,
Éditions de la Revue des Poètes, 1912 (p. 47-48),
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