Près de la mer. Poème en prose

Lorsqu’il sent poindre en lui les assauts de la dépression, il s’en va chercher refuge près de la mer. Elle ne se lasse pas de chanter, pour lui comme pour quiconque, la même histoire de vagues et d’écume, offrant à chacun, pour rien, son spectacle de rue, ses acrobaties légères, sa danse de voiles et de tulle. Jamais elle ne refuse de donner, à qui le demande, sa vision toute féminine de l’infini. Elle est une présence qui apaise, dans le bercement du ressac et la ligne pure de l’horizon. Elle laisse, à qui veut bien les trouver, de menus lots de consolation : morceaux de verre colorés, squelettes d’oursin étoilé, fragments d’algues desséchées… Certains jours, assis sur un banc, face au vide, seul avec la mer et plus uni encore avec elle qu’un doge de Venise, il écoute sa fable mélancolique, ses plaintes caricaturales et ses cris de mouette effarouchée. Il ne lui reproche pas son emphase, non plus que ses trop longues phrases et sa grandiloquence mal placée. Il sait qu’en dépit de ses postures de cinéma, de ses airs de princesse et de son humeur fantasque, la mer est sincère. Il laisse à cette amie fidèle le soin de bercer son chagrin.

Gabriel Grossi, janvier 2021.

9 commentaires sur « Près de la mer. Poème en prose »

    1. Bonjour,
      Il n’y a pas de problème dans la mesure où vous avez indiqué correctement la source et même présenté mon travail. Je vous remercie au contraire d’avoir donné de l’écho à ce modeste poème. Bien cordialement.

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  1. Bonjour, sans en être très loin depuis Toulouse, l’amie sincère qui sait consoler de beaucoup de maux me manque, et je ne peux la rejoindre que pour de grandes occasions – qui n’ont plus guère cours aujourd’hui.

    Elle a aussi inspiré nombre de mes écrits nostalgiques, et sa seule évocation parvient à m’apaiser.
    Merci pour ces mots.

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