En septembre, les élèves ont repris le chemin de l’école. Ils doivent alors découvrir ou redécouvrir les bases de la grammaire. Mais par quoi commencer ? Il suffit de consulter des manuels pour se rendre compte que tous ne font pas les mêmes choix. J’ai pour ma part l’habitude de commencer avec la phrase, avant de « zoomer » sur des points plus précis.
1. Qu’est-ce qu’une phrase ?
Du CE1 au CM2, comme cela est très banal de le faire, j’aime bien par commencer par définir la phrase, avec ces trois critères que sont la majuscule initiale, le signe de ponctuation final, et surtout le fait que la phrase ait un sens, qu’elle veuille dire quelque chose. Bien évidemment, il faudra très longuement insister sur ce fait avec des élèves qui découvrent la grammaire pour la première fois. À mesure que les élèves avancent en âge, on pourra se permettre d’aller plus vite, mais le rappel reste nécessaire, et il est faux de croire cela acquis pour tous en cours moyen.
Comme vous devez commencer à le savoir, j’aime les activités de tri, qui sont pour moi de vrais problèmes de recherche, qui permettent réellement aux enfants de s’interroger sur la langue.

- La séance a commencé par un premier temps collectif, très bref, dans lequel je demandais aux élèves d’indiquer le nombre de phrases d’un petit texte écrit au tableau. Cette année, en CE2-CM1, les élèves n’ont eu aucune peine à trouver. Mais l’intérêt était qu’ensuite ils explicitent leur procédure. Les repères graphiques de la phrase (majuscule, point) émergent alors.
- Ensuite, les élèves ont reçu des étiquettes à trier en deux catégories. Il s’agissait de « vraies phrases » et de « fausses phrases » (non respect de l’un des trois critères). C’est une phase facile à différencier. Déjà, toutes les phrases ou pseudo-phrases sont écrites avec la police « Open Dyslexic » (et sont distribuées ainsi, même aux enfants qui ne sont pas dyslexiques). Ensuite, les phrases ne sont pas les mêmes selon l’âge et le niveau des enfants. Et s’il y a un enfant qui peine excessivement, on peut toujours retirer une ou deux phrases pour lui.
- La mise en commun permet de faire émerger la règle : une phrase commence par une majuscule, se termine par un point, et veut dire quelque chose. Elle a un sens.
- Lors des jours suivants, de brefs exercices de réinvestissement permettent de revenir sur cette notion (par exemple, des phrases dont les mots sont à remettre dans le bon ordre). Il apparaît généralement que certains élèves ont tendance à omettre l’un ou l’autre des trois critères, et il faut y revenir plusieurs fois avant que cela s’installe fermement dans l’esprit des élèves. Ce n’est qu’au bout d’un certain temps que les choses sont systématisées avec une leçon écrite à mémoriser.
2. Les types de phrases

La deuxième étape consiste à distinguer les différents types de phrases. Savoir le faire, c’est utile pour savoir lire en usant du ton approprié, c’est nécessaire pour comprendre ce qu’on lit, et ce sera plus tard indispensable pour rédiger correctement des phrases de tous types (la phrase interrogative nécessitant un sujet inversé et un mot interrogatif, la phrase impérative n’ayant généralement pas de sujet exprimé).
La séquence a débuté avec une activité de tri d’étiquettes. Les enfants devaient ensuite donner un nom aux familles qu’ils constituaient. Ils étaient bien sûr laissés libres dans leur façon de les désigner. Ils ont eux-mêmes opté pour trois catégories, et choisi des noms de catégories liés à la ponctuation. C’est donc par la suite qu’il a fallu instaurer la désignation officielle : phrase déclarative, phrase interrogative, phrase impérative. C’est précisément ce à quoi sert la mise en commun au tableau :

On notera au passage que les nouveaux programmes évoquent trois types de phrases, là où l’on avait longtemps parlé de quatre. Je me suis déjà longuement étendu sur la question dans un autre article, auquel je me contenterai donc ici de renvoyer.
3. Les formes de phrase et la transformation négative
Les élèves doivent ensuite comprendre que ces phrases peuvent se mettre à la forme affirmative ou à la forme négative. Pour cela, j’utilise comme situation de découverte le jeu de l’âne têtu, qui dit toujours le contraire de ce qu’on lui dit. Ce petit jeu oral plaît d’ordinaire beaucoup aux élèves. Les enfants doivent ensuite désigner les mots qui ont changé au cours de la transformation. Ils distinguent ainsi les mots négatifs que sont « ne » et « pas ».
- Au cycle 2, on insistera sur la transformation dans les deux sens.
- Au cycle 3, on pourra ajouter d’autres mots négatifs, tels que rien, plus, jamais, etc. (Les grammairiens Damourette et Pichon nomment ces mots des forclusifs).
Quels exercices de réinvestissement proposer pour cette troisième séquence ? Des exercices de tri (classer des phrases selon leur forme), des exercices de transformation, etc. J’aime bien que les exercices fassent appel à différentes actions : classer, écrire ou réécrire, relier, colorier…
4. Vers la notion de verbe
La phrase négative est une excellente porte d’entrée vers la notion de verbe. Elle permet de l’isoler facilement, puisqu’il se trouve généralement entre les deux mots négatifs. Cela fournit une définition pratique du verbe. Il faudra alors multiplier les approches différentes afin que les élèves acquièrent les différentes définitions du verbe, telles que je les proposais dans mon article intitulé Abrégé de grammaire française :
- Une définition sémantique : les verbes permettent d’évoquer des actions et/ou des états. Une définition insuffisante, car il y a aussi des noms d’action : la catégorie du substantif peut donc également permettre de désigner des actions.
- Une définition morphologique : les verbes se conjuguent. Ils sont variables en nombre et en genre (comme les noms) mais aussi en temps, en personne et en diathèse (la voix active ou passive).
- Une définition syntaxique : si les phrases étaient des systèmes solaires, les verbes seraient des soleils. D’où cette idée de « pivot » ou de « base » de la phrase.
- Une définition pratique : pour trouver le verbe, mettez la phrase à la forme négative, le verbe se trouve alors entre « ne » et « pas ».
En cycle 2, j’attends généralement d’être arrivé à cette première définition du verbe pour réellement commencer la conjugaison (je fais donc deux grosses séances de grammaire par semaine, au lieu d’une seule lors des périodes suivantes). J’estime en effet qu’il n’y a pas grand sens à apprendre des conjugaisons sans savoir ce que sont une phrase et un verbe. En cycle 3, je fais ces quatre séquences à peu près de la même manière, mais en moins de séances, ce qui me permet de démarrer un peu plus tôt la conjugaison, et d’avoir ainsi le temps d’aborder des notions plus complexes.
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J’ai bien conscience que je ne propose rien ici de particulièrement original, mais je pense que cette démarche repose sur des principes de bon sens : des situations de découverte permettant aux élèves de manipuler et de réfléchir, des exercices de réinvestissement et d’approfondissement, des leçons écrites qui n’arrivent pas trop tôt. J’espère que cette proposition vous aura intéressés. N’hésitez pas à laisser des avis, remarques, questions dans l’espace réservé aux commentaires !

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