Parcours dans la poésie de Béatrice Bonhomme

Née en 1956 à Alger, Béatrice Bonhomme vit à Nice, où elle enseigne la Littérature française du vingtième siècle à l’Université. Dans le cadre de son travail de recherche universitaire, elle a fondé l’axe « Poïéma » au sein du Centre Transdisciplinaire d’Épistémologie de la Littérature, laboratoire qu’elle a dirigé pendant plusieurs années. Elle a écrit de nombreux ouvrages critiques et articles sur la poésie, mais aussi sur le roman (notamment sur Jean Giono). Elle a fondé la revue Nu(e) qui rassemble poètes, critiques et plasticiens, désormais publiée en ligne sur le site Poezibao. Elle m’a fait l’honneur de diriger ma thèse de doctorat. Elle est aussi — et surtout — l’auteur de nombreux ouvrages poétiques, récompensés par le prix Senghor en 2016 et par le prix Vénus Khoury-Ghata en 2019.

1. L’Âge d’en haut (Poèmes, 1989-1992)

Titre : L’Âge d’en haut
Éditeur : Melis éditions
Lieu d’édition : Colomars (Alpes-Maritimes)
Date d’édition : 2004
ISBN : 2-914333-70-6
Nombre de pages : 247

Couverture de « l’âge d’en haut »

En 2004, Béatrice Bonhomme réédite la majeure partie de son œuvre poétique aux éditions Mélis, dans un coffret de cinq livres. L’Âge d’en haut est, chronologiquement, le premier : il rassemble L’Âge d’en haut (1989), Le Pas de la clé (1991), La Joue du loup (1992).

L’ouvrage s’ouvre sur une préface de Tristan Hordé, lexicographe et critique littéraire, préface elle-même poétique et qui a très bien, je trouve, saisi le ton de la poésie de Béatrice Bonhomme :

« Tout commence les mots rapprochés couleur des débuts et des fins
le bleu le noir la mort le rouge le vert
les paysages des passés des vents qui se calment
et l’on mord sa lèvre pour le sang levé
temps d’oiseaux de ciels qui s’éloignent des odeurs d’eaux premières »

Tristan Hordé, préface de « L’Âge d’en haut », p. 7.

Rien que dans cette première strophe, on note l’importance des commencements qui fait écho au titre de L’Âge d’en haut (« tout commence », « eaux premières »), on note aussi la présence du thème de la mort et du corps, ainsi que l’inscription du poème dans des « paysages ». Cela résume bien, je trouve, quelques caractéristiques de la poésie de Béatrice Bonhomme.

Les premiers poèmes sont plutôt brefs, dans une économie de mots qui témoigne déjà de la nudité chère à Béatrice Bonhomme. Citons le poème liminaire :

« Au pauvre chat enfant
parti sur un parfum
sur cette terrible confiance
regard pervenche

cassé de mosaïque bleue
mon petit génie noir

le chat fée »

Béatrice Bonhomme, « L’Âge d’en haut », p. 13

Ce poème s’inscrit dans une dimension de vécu autobiographique tout en s’épurant de tout détail qui infléchirait le poème vers le récit. Il ne s’agit pas de raconter, mais d’extraire du vécu ce qui peut faire matière à poème. Ici, l’on ne saura pas dans quelles circonstances la poète a rencontré le petit chat. Ne reste que la force de la rencontre entre l’humain et l’animal, cette gravité marquée par les adjectifs « pauvre » et « terrible », et l’identification du chat au merveilleux (« génie », « fée »). On notera l’emploi du mot « fée » comme adjectif, vieilli mais possible.

Dans le poème suivant, c’est le recours aux phrases nominales qui fait l’intensité du poème:

« un prénom, la mort
la jouissance, la vie

les arches d’un viaduc
la buse aux ailes argentées

la peur

la joie

le souvenir qui ne se heurte à rien »

Béatrice Bonhomme, « L’Âge d’en haut », p. 14.

Les nombreux sauts de ligne soulignent la nudité de ce poème. Là encore, les contours du récit sont effacés. Il n’en reste que quelques lignes de paysage : « les arches d’un viaduc / la buse aux ailes argentées ». Seule Béatrice Bonhomme connaît les circonstances particulières de l’instant qui s’est inscrit dans ce poème. En effet, le vécu autobiographique n’importe pas en tant que tel, mais seulement en ce qu’il permet d’ouvrir sur quelque chose de partageable et d’universel. Ici, l’universel réside dans l’expression de sentiments antagonistes très puissants : « la peur // la joie ». On a l’impression d’une exacerbation des sensations, si bien que l’instant est capable de contenir aussi bien « la mort » que « la vie ».

La présence de la mort explique sans doute l’impression d’intensité — d’urgence ? — des moments de vie. Certains poèmes présentent une dimension érotique (« L’orgasme est une discipline / pleine de cyprine et de fleurs / où tu te dresses comme un mât », p. 18), d’autres s’inscrivent dans le sang :

« lui crucifié tout le monde l’entoure
et ce sang qui sèche si vite ces sifflements dans les oreilles
cet écrasement de chaleur

et ce sang déjà séché n’a coulé que pour te rendre
plus hallucinant et plus beau
col roulé dont la couleur t’allait si bien
vermeil et chaud
coupant ta gorge d’une vision fantastique
tranchant ton teint blafard »

Béatrice Bonhomme, « La Rivière effacée », dans « L’Âge d’en haut », p. 97.

Bien sûr, l’image du crucifié fait penser à Jésus. Mais en même temps, on se demande si Béatrice Bonhomme parle du Christ, ou plus simplement de l’être aimé, comme le suggèrent le tutoiement et les marques de tendresse (« plus beau », « t’allait si bien »). La poète, bien entendu, joue de cette ambiguïté, érigeant l’homme aimé en figure christique, sans pour autant inscrire la divinité dans le poème, qui insiste uniquement sur la dimension sanglante du corps, sur le « col roulé » qui devient progressivement une blessure tranchante.

Citons encore un poème :

« là où ne se pose nul
vol d’oiseau d’étoiles
là où le chemin n’aboutit
pas
là où ce vertige est infini
là, j’ai posé ma tête entre
mes bras »

Béatrice Bonhomme, « L’Enfant mélodie », dans « L’Âge d’en haut », p. 230.

Où est ce lieu simplement défini par « là » ? Personne ne saura le repérer sur une carte. L’anaphore du « là » scande le poème, d’abord développée par un rythme ternaire de propositions relatives, mais à la forme négative, puis — et c’est l’apodose — arrêtée par la virgule, « là » devenant le lieu où l’on s’arrête, où « j’ai posé ma tête entre mes bras ».

Dès ce premier recueil, certains jalons sont déjà posés : nudité de l’expression ; intensité de la vie, de la mort, du corps, de l’amour ; force du vécu intime malgré (ou grâce à) l’effacement des données autobiographiques. Une poésie qu’on pourrait dire, à certains moments, à fleur de peau. Beaucoup de poèmes sont très brefs, d’autres un peu plus longs. Certains angoissés, d’autres parfaitement sereins, comme dans ce distique lapidaire:

« le miracle d’être là
le bonheur de chaque instant »

Béatrice Bonhomme, « La Claire », dans « L’Âge d’en haut », p. 61.

2. Photographies (Journal, 1992-1995)

Titre : Photographies
Éditeur : Melis éditions
Lieu d’édition : Colomars (Alpes-Maritimes)
Date d’édition : 2004
ISBN : 2-914333-73-0
Nombre de pages : 85

Myrtos mon amour. Un titre durassien pour une première section centrée sur la Crète, et qui vient rappeler l’importance de la Méditerranée pour Béatrice Bonhomme.

« La mer longtemps en face des rochers, l’odeur de la mer, soleil salé, l’odeur même de leur amour. L’adolescence devant la mer, les cheveux mouillés d’embruns, des plumes dans leurs mains. »

Béatrice Bonhomme, « Myrtos mon amour », dans Photographies, p. 13.

Ce sont par ces mots que commence le recueil, ainsi placé sous les auspices de la Méditerranée, avec toutes les images et les odeurs que le seul mot de « mer » suffit à évoquer. On notera le recours à la troisième personne — « leur amour », « leurs mains » — choix volontairement énigmatique, nul personnage n’étant nommé, là où l’on attendrait la présence du je lyrique. On peut y voir une façon de mettre à distance, là encore, ce qu’un discours à la première personne aurait de trop personnel, avec une volonté, constante chez Béatrice Bonhomme, de faire tomber dans l’universel ce qui était au départ puisé dans le plus intime.

Mais le tu, la deuxième personne, n’est pas loin, et Myrtos devient alors un nom propre de personne :

« Myrtos mon amour tu es déjà venu ici avant moi, dans l’éternité, Myrtos une pierre verte, les allées entre les maisons, il faut gravir à pied sous le soleil quelques vestiges, Myrtos mon amour nous nous sommes aimés il y a plus de mille ans d’ici sur cette terre. Les propylées sud du palais de Knossos. »

Béatrice Bonhomme, « Myrtos mon amour », dans Photographies, p. 13.

Béatrice Bonhomme suggère ici l’idée d’une vie antérieure, ou du moins d’une éternité d’amour, tant il est vrai que l’amour véritable semble n’avoir ni commencement ni fin. On peut noter comment les ruptures syntaxiques et les virgules permettent aux différents groupes rythmiques de ne constituer qu’une seule phrase ample, scandée par la répétition incantatoire du nom de « Myrtos ».

Plus loin dans le poème, Myrtos devient un amour absent, et, dans des versets sublimes, Béatrice Bonhomme dit la douleur de l’absence :

« Myrtos mon amour, t’emporter partout où je suis ton sourire et dépasser l’absence, les rideaux verts voguent un bateau amarré sur le bord de ces rochers.
Cette absence toujours à supporter. Je ne sais plus qui je suis. Tu m’as quittée. Depuis cet instant je ne suis plus moi. Ce soir dans la rue, les autres, d’autres gens, d’autres visages. Rien de commun entre eux et moi. Le sentiment d’appartenir à un autre monde.
Le manque, une déchirure qui n’en finit plus d’arracher un à un les lambeaux du passé comme s’il fallait arracher la mémoire.
[…]
Des maisons face à la mer, des façades où nous aurions pu vivre, tout ce en quoi je ne crois plus, une plaie toujours ouverte sur le mal de toi, tu es manque constant, certitude absolue
je t’aime, j’accepte cet amour, je t’accepte, dans la douleur et la joie, pauvre absence perdue dans les pierres de Myrtos, sur le chemin brûlant de quelques ruines. »

Béatrice Bonhomme, « Myrtos mon amour », dans Photographies, p. 16.

D’un souffle un seul, Béatrice Bonhomme dit la douleur de la séparation, et, dans le même temps, dépasse cette douleur dans un élan d’amour et d’acceptation qui inclut, mêlée à la douleur, une forme de joie. Je trouve cela très beau et c’est pourquoi je me suis permis de citer un assez long passage.

Mais Photographies ne se circonscrit pas à la Crète. La deuxième section s’intitule « Une Fenêtre sur Naples », ce qui peut rappeler les origines napolitaines du père de la poète, tandis que la troisième, « Nuit de Cluis », peut faire penser à la maison familiale dans le Berry.

« nuits de Cluis
être en contemplation, dans le noir pur d’un profil
percevoir ta chaleur à travers la chemise légère
l’odeur de réglisse et de tabac et puis le goût de ta bouche
la texture de ta peau
l’élan de tes bras
un parfum de menthe
nuits de Cluis, douceur de ton corps au creux du noir
sensation poignante de ton corps je ne peux plus mentir »

Béatrice Bonhomme, « Nuits de Cluis », dans Photographies, p. 33.

On peut apprécier la sensualité de ce passage, adressé à un être aimé, un être absent (« j’attends le moment […] où je sentirai en moi l’absence que tu as / signifiée »). Cette douceur sensuelle côtoie des images beaucoup plus violentes :

« nuits de Cluis,
tous les mots frappent le cœur, l’amant saute par la fenêtre oublie son échelle de corde et plante au cœur de la nuit le noir poignard d’Othello »

Béatrice Bonhomme, « Nuits de Cluis », dans Photographies, p. 35.
Silhouette d’homme de dos (Pixabay)

Les mêmes thèmes et la même force poignante réapparaissent dans le dernier poème, intitulé « Le Chapeau du magicien », qui retrouve les motifs de l’adresse à l’homme aimé et de la souffrance liée à l’absence :

« pourquoi faut-il que je me souvienne de ma main prise dans la tienne // mon alliance dans ton alliance

[…] aujourd’hui même que j’écris le manque de ta voix, de ton amour, il n’eut fuite de ma part que dans le destin de nos vies

[…] sur ton absence je ne savais échafauder que des mots, des lettres, des mots

[…] tu fermes les persiennes et tu crées la magie de ta langue, de ta sueur, de ton sperme qui s’envole des colombes

tu es le chapeau de magicien, tu tiens dans ta main les foulards et fais s’envoler les oiseaux

tu tiens dans tes mains les étoiles, soulève le chapeau d’écume, dévoile cette jouissance, possède mon ravissement »

Béatrice Bonhomme, « Le Chapeau du magicien », Photographies, p. 81-82.

En dépit même de « l’absence » et du « manque », le poème n’en reste pas à l’expression de la douleur, mais développe le registre de l’éloge, célébrant dans l’être aimé un « magicien ».

3. Jeune homme marié nu
(Poèmes, 1993-1995)

Titre : Jeune homme marié nu
Éditeur : Melis éditions
Lieu d’édition : Colomars (Alpes-Maritimes)
Date d’édition : 2004
ISBN : 2-914333-71-4
Nombre de pages : 235

Couverture de l’ouvrage

J’aime beaucoup ce titre, son absence de déterminant, cette juxtaposition inattendue des deux adjectifs : Jeune homme marié nu. Beaucoup d’images passent dans ces quatre mots.

On retrouve quelques uns des motifs déjà aperçus dans les recueils précédents : l’amour, la mer, l’absence, la souffrance…

« parfaitement donné
adonné
à l’amour dans
mes bras
de blanc vierge
jeune homme
silencieux de
passion et de
neige »

Béatrice Bonhomme, « Jeune homme marié nu », dans Jeune homme marié nu, p. 175.

Ce poème, le premier de la section éponyme, séduit par sa brièveté. Les trois quarts de la page demeurent blancs. Les vers, très courts, jouent de l’enjambement. L’esthétique de la nudité se signale par l’absence volontaire de tout effet d’enjolivure. De poème en poème, Béatrice Bonhomme décline le motif. Citons les deux poèmes suivants, imprimés sur deux pages distinctes :

« Jeune homme nu assis au bord de la mer », Hippolyte Flandrin, Flickr.

« jeune marié de
silence
d’amour vierge
donné, livré
à mes bras nus »

« jeune marié
en chemise blanche
de condamné
chevalier amoureux
et courtois dans ta larme »

Béatrice Bonhomme, « Jeune homme marié nu », dans Jeune homme marié nu, p. 176-177.

On voit comment Béatrice Bonhomme reprend les mêmes mots pour tresser les mêmes motifs, tout en faisant surgir des images nouvelles, ici celles du « condamné » et du « chevalier », qui renvoie à l’imaginaire de l’amour courtois, tout en jouant sur la proximité phonétique de « lame » et de « larme » pour ajouter un soupçon de tristesse.

Dans Jeune homme marié nu, la sensualité confine parfois à l’érotisme. Elle se nimbe tantôt de douceur et de quiétude, tantôt au contraire de douleur, d’inquiétude et d’une brûlante déchirure.

« si désormais dans ton cœur
tu me gardes pour toujours près de toi
malgré la douleur je peux continuer à vivre »

Béatrice Bonhomme, « Faire la nuit », dans Jeune homme marié nu, p. 37.

4. Poumon d’oiseau éphémère
(Poèmes 1996-2001)

Titre : Poumon d’oiseau éphémère
Éditeur : Melis éditions
Lieu d’édition : Colomars (Alpes-Maritimes)
Date d’édition : 2004
ISBN : 2-914333-72-2
Nombre de pages : 252

Quatrième volume du coffret paru en 2004 aux éditions Melis, Poumon d’oiseau éphémère rassemble des poèmes rédigés ou publiés entre 1996 et 2001. Ses deux sections principales, respectivement intitulées « L’Embellie » et « La Grève blanche », comportent elles-mêmes de nombreuses sous-sections, comportant chacune un millésime.

Commençons par citer ce poème que je trouve assez représentatif de la facture de Béatrice Bonhomme :

« Il a dit, tu es ma femme
perdue, tu es ma femme
— perdue, éclatée, jouissante
tu ne seras jamais ma femme

Il a dit, femme perdue je t’aime
donne encore les oiseaux de
tes chants
dans la distance j’ai rencontré mon amour
jouis le temps qui prend le temps de n’être plus »

Béatrice Bonhomme, « Sauvages », dans Poumon d’oiseau éphémère, p. 26.
Couverture de l’ouvrage

Le poème se construit par la répétition lancinante de motifs élémentaires. Il y a quelque chose de litanique, peut-être même d’incantatoire, dans cette façon de répéter « Il a dit », formule qui peut faire penser à la Bible (« Dieu dit : Que la lumière soit »). On a l’impression que c’est à la parole masculine de dire ce qu’est la femme.

Le jeu de l’enjambement permet de transformer le dit d’amour (« tu es ma femme ») en un énoncé signifiant tout autre chose (« tu es ma femme / perdue »). L’être de la femme est comme dépendant de la parole masculine, capable de la faire exister (« tu es ma femme ») comme de la renier (« tu ne seras jamais ma femme »). Aussi peut-on parler, dans ce poème, d’une toute-puissance de la parole masculine.

La section qui donne son titre au recueil est marquée par le thème de la mort. Les métaphores de la mousse et des algues permettent d’évoquer une maladie pulmonaire chez un être cher :

« je repense
à l’homme
qui revit soudain
entouré de sa famille
on le croit sauvé
il revit
le soir il semble fatigué, nerveux
et le lendemain, prostré,
agonique
la mousse verte
comme une crème
une mousse d’étoile
a envahi son corps
de poumon et d’algues
il ne respire plus »

Béatrice Bonhomme, Poumon d’oiseau éphémère, p. 111.

L’effacement des données biographiques et le souci de pudeur de Béatrice Bonhomme ne sont pas sans rappeler Leçons de Philippe Jaccottet. La nudité même de l’expression renforce le tragique de la situation : ce que la famille prenait pour une rémission n’était en réalité qu’un dernier sursaut de vie. Et les poèmes suivants reprennent les images de la « mousse », du « lichen », des « branchies » pour évoquer l’asphyxie progressive de ce « poumon d’oiseau éphémère ».

Parmi ces poèmes, il en est un plus paisible, où l’effroi de la mort qui vient laisse place à une parole de remerciement :

« Comment remercier
pour ce si petit fil d’espoir
et de salive
de respiration fine
que semble parfois confier l’air
aux poumons de silence ? […] »

Béatrice Bonhomme, Poumon d’oiseau éphémère, p. 121.

Je trouve ça beau, que le poème n’en reste pas à l’expression de la souffrance, mais introduise le remerciement, alors même que le locuteur sait que l’être aimé est condamné à mourir. Le mot « désormais » marque le moment où survient l’acceptation de la mort :

« Désormais il n’est plus nécessaire d’échapper
car la mousse a rejoint le corps des lichens
et ramène à la terre
cet horizon de neige et d’air
gonflé de sang.
Désormais nul besoin de s’agiter
juste pénétrer en soi le travail des mousses
et ne plus chercher l’étroit passage
où s’ouvrirait une fenêtre
car la mousse a grandi
sur l’étoile des poumons
et tout a fait son nid
désormais dans la mort. »

Béatrice Bonhomme, Poumon d’oiseau éphémère, p. 120.

La triple répétition de l’adverbe « désormais » introduit une parole plus sereine que dans les poèmes précédents. L’irruption des « mousses » dans le corps n’est plus un problème angoissant, mais un « travail », un processus inévitable qu’il ne reste qu’à accepter. Les phrases négatives — « il n’est plus nécessaire », « nul besoin de », « ne plus chercher » — marquent l’inutilité de la lutte.

5. Cimetière étoilé de la mer
(Versets 1995-2003)

Titre : Cimetière étoilé de la mer
Éditeur : Melis éditions
Lieu d’édition : Colomars (Alpes-Maritimes)
Date d’édition : 2004
ISBN : 2-914333-74-9
Nombre de pages : 67

C’est encore un beau titre que celui de Cimetière étoilé de la mer, qui tout en évoquant l’étoile de mer fait également penser au « Cimetière marin » de Paul Valéry. Ce recueil de versets développe le motif de la fêlure, de la blessure :

« Si je devais commencer à écrire, je commencerais par la blessure, la déchirure, je répéterais la blessure, la déchirure, éternellement, le retour à la mère, le retour à son ventre de plume et de limon, à son ventre de ciel. »

Béatrice Bonhomme, « Femme de tulle et de pierre posée sur du papier », Cimetière étoilé de la mer, p.17.
Couverture de l’ouvrage

On retrouve dans cette citation inaugurale le caractère litanique de la poésie de Béatrice Bonhomme. Ces propos font de la blessure quelque chose de premier, d’originel, comme si tout commençait par cette déchirure. Le verbe « répéter » et l’adverbe « éternellement » marquent le caractère obsessionnel du propos.

La dédicace au plasticien Serge Popoff laisse supposer qu’il s’agit là de la description d’une œuvre d’art, peut-être d’une statue représentant la « Mère première, matière, archétype de sources et de lignes, femme taillée, arrachée à la pierre, déesse au bras dressé ». Mais, au-delà, le motif de la faille et de la blessure parcourt l’œuvre de Béatrice Bonhomme.

Le thème de la mort est encore très présent dans ce recueil. Citons la toute dernière page:

« il dit vous allez mourir d’un arrêt cardiaque

et la tendresse du cœur est une étoile rouge étoilée de soleil

striée de mer et de montagne où baigne l’oxygène d’un bateau qui s’en va

mon cœur rit étoilé de branchies et de mer
d’eau salée et de sang

car mon cœur ne meurt jamais au cœur de la main du monde »

Béatrice Bonhomme, « Présence de la pierre », Cimetière étoilé de la mer, p. 65.

6. Les Gestes de la neige

Titre : Les Gestes de la neige
Éditeur : L’Amourier
Lieu d’édition : Coaraze (Alpes-Maritimes)
Date d’édition : 1998
ISBN : 2-911718-15-1
Nombre de pages : 56

Les Gestes de la neige

C’est un très beau recueil que Les Gestes de la neige, paru en 1998 aux éditions de l’Amourier. Il y a, dans ce pluriel de « Gestes », une référence probable à la chanson de geste, à l’épopée médiévale, puisque l’être aimé est appelé le « croisé d’enfance », également rapproché d’une figure christique :

« mon croisé d’enfance, jeune homme
délicat fragile de sourire
aux douleurs d’épine »

Béatrice Bonhomme, « Le croisé d’enfance », Les Gestes de la neige, p.13.

Il est encore question d’un « crucifié destin », des « mains de fleurs aux couronnes / d’épines », qui filent la métaphore christique. L’homme aimé est, tout à la fois, associé à l’enfance et à la souffrance, à la fragilité et à la douleur. L’intensité de l’amour est marquée par la sensualité du poème :

« Au centre du monde
se situait la fourche amoureuse
du cou, ta clavicule
métaphysique »

Béatrice Bonhomme, « Le croisé d’enfance », Les Gestes de la neige, p.16.

Le corps érotisé est situé « au centre du monde ». Aussi la relation amoureuse est-elle élevée à une dimension presque cosmogonique, du moins « métaphysique » pour reprendre l’adjectif employé par la poète elle-même. Le corps devient une sorte de géographie, et la relation sexuelle, un moyen d’accéder à « l’unité » :

« Là se rejoignent les deux rives
et fusionne le corps des mers
[…] et se rejoint
le cri de l’unité blondie »

Béatrice Bonhomme, « Le croisé d’enfance », Les Gestes de la neige, p.18.

La deuxième section, intitulée « La réserve et la brûlûre », commence par un poème que j’aime beaucoup. Le discours direct libre de l’homme aimé apparaît comme une injonction à la légèreté, une invitation à simplement jouir de la vie. Et la suppression des deux points et des guillemets marque dans le rythme même du poème cette légèreté. Mais en même temps, ce n’est qu’un « il dit », si bien que cette légèreté n’est peut-être qu’une apparence…

Monet, Étude pour un déjeuner sur l’herbe (Wikimedia commons) :
« Que votre robe soit une corolle »

« Il dit chérie soyez légère
de l’autre côté de l’été
survivra la neige
il dit chérie et que
votre robe soit une
corolle
il dit comme ça, je veux un enfant de vous,
soyez légère,
et que cela ne veuille rien dire
je veux te faire jouir la vie
et jouir la jouissance
soyez légère ma chérie »

Béatrice Bonhomme, « La réserve et la brûlure », Les Gestes de la neige, p. 27.

Les poèmes suivants reprennent ce leitmotiv du « soyez légère », tandis que le deuxième poème commence par les mots « Vous dites n’importe quoi », comme si cette injonction à l’épicurisme n’allait pas de soi.

« je te livre un enfant
aux yeux nus
abandonné aux vagues
un enfant aux yeux clairs
abandonné de larmes
je te livre cet enfant
aux yeux nus »

Béatrice Bonhomme, « Le chemin de la mer », Les Gestes de la neige, p. 42.

Après une troisième section dans la lumière de la mer, c’est enfin la neige qui apparaît dans la quatrième section. Et c’est un très beau poème d’amour dans la pureté de la neige, où surgit aussi le motif de l’enfance. La neige suggère une pureté originelle, où l’on revient à la simplicité des commencements, à l’enfance :

Jour de neige, par Alpha du Centaure, flickr, libre de réutilisation

« Pour toi je réinventerai les gestes
de la neige
les gestes des premières éclaboussures
d’étoiles aux taches de la neige
je réinventerai les premiers mots
de neige
et notre enfance sous le givre des cloîtres »

Béatrice Bonhomme, « Les gestes de la neige », Les Gestes de la neige, p. 49.

Les verbes au futur dessinent la promesse d’un retour à la simplicité originelle. La parole créatrice se manifeste ici dans toute sa puissance, capable de réinstaurer par les mots cette pureté de l’enfance manifestée par la neige. Et cette proclamation est un leitmotiv qui scande l’ensemble du poème, lequel progresse par le jeu des répétitions :

« je réinventerai les premiers
mots de neige
et notre enfance au long sable
des plages »

Béatrice Bonhomme, « Les gestes de la neige », Les Gestes de la neige, p. 51.

7. et 8. Mutilation d’arbre
et Passant de la lumière

Béatrice Bonhomme a consacré deux livres de deuil à son père, le peintre Mario Villani, né en Algérie en 1916 et mort à Nice en 2006. Tous deux sont parus en 2008, mais, à mon sens, Mutilation d’arbre vient avant Passant de la lumière, en ce que la souffrance du deuil est plus vive dans le premier (du moins au début du livre), alors que le second est plus serein et lumineux. Le premier est plus proche du récit, le second plus proche du poème. Tous deux sont des livres magnifiques.

Mutilation d’arbre
Éditeur : Collodion
Date d’édition : 2008
Nombre de pages : 28
Passant de la lumière
Éditeur : L’Arrière-Pays
Date d’édition : 2008
Nombre de pages : 22

Mutilation d’arbre dit le désarroi de la poète face à cette réalité inacceptable, impossible, inconcevable :

« Il y a cette révolte en moi devant ton immobilité, car il n’est pas question que tu dormes, toi le vivant, toi l’éveillé […]. Il n’est pas question que tu dormes, toi l’inquiéteur qui fêtes l’anniversaire des fleurs avec ta générosité coutumière. »

Béatrice Bonhomme, Mutilation d’arbre, p. 11.

Béatrice Bonhomme dit son sentiment de n’avoir pas mis en terre un homme de quatre-vingt-dix ans, mais un tout jeune homme. Elle se sent désormais la « dépositaire du cœur de la tombe », paradoxale mère de celui qui n’est plus :

« Je suis restée avec toi, car tu es en moi, devenu moi par ton agonie, comme si j’avais accouché d’un jeune homme intouchable, porté en terre dans la splendeur de sa création d’étoile. »

Béatrice Bonhomme, Mutilation d’arbre, p. 12.

Et c’est peut-être ainsi que se fait le travail d’acceptation. On voit la poète passer du refus — « Te dire mort est une hérésie » (p. 17) — à une idée de continuation par-delà la mort. Aussi Passant de la lumière, le deuxième ouvrage consacré à Mario Villani, est-il beaucoup plus paisible, plus lumineux. L’ampleur presque cérémonielle du poème permet de s’élever au-dessus de la souffrance et de faire du poème un éloge solennel :

« Et désormais tu dors en moi avec tes mains de gisant, avec tes yeux couleurs de menthe. »

Béatrice Bonhomme, « Paysage de ta tombe », Passant de la lumière, p. 9.

Il ne s’agit plus de mutilation mais de sommeil. Le mort n’est pas simplement annihilé mais vivant dans le cœur de ceux qui l’aiment et se souviennent de lui. L’un des poèmes s’intitule « Nidification de la lumière » : la mort n’est alors plus seulement un terme, mais un passage. « Les yeux ouverts sur la lumière, je t’ai porté comme un passeur où coule la neige de notre échange dans la mutation non-visible de nos transformations de cœurs » (p. 14).

Aussi le recueil se termine-t-il avec l’image du passereau. On entend la notion de passage dans le nom de cet oiseau qui, en fin de poème, se transforme en phénix, l’oiseau qui renaît de ses cendres :

« Et dans les plantes aromatiques, la myrrhe d’un étrange berceau, il passe et renaît, passereau, oiseau de cendre et de lumière. »

Béatrice Bonhomme, « Passage du passereau », Passant de la lumière, p. 22.

9. La Maison abandonnée

Titre : La Maison abandonnée
Éditeur : Melis
Lieu d’édition : Colomars (Alpes-Maritimes)
Date d’édition : 2006
ISBN : 235210-006-2
Nombre de pages : 52

Il y a quelque chose de puissamment mélancolique — ou nostalgique, comme on voudra — dans cet ouvrage, de par son sujet même. Une maison abandonnée, ça parle, forcément, du passé, des joies et des peines qui se sont tenues en cet endroit désormais à l’abandon, en décrépitude, et qui sera détruit.

« La maison abandonnée est devenue la proie de l’arbitraire. Des oiseaux ont été dessinés sur les murs comme des nappes de couleur avec des fleurs à la Matisse, utilisant les motifs déjà existants d’une ancienne tapisserie ; çà et là on découvre la tendresse désuète d’une plume posée avec le mousseux d’un flocon. »

Béatrice Bonhomme, La maison abdandonnée, p. 20.

C’est donc une sorte de palimpseste qui apparaît sur les murs de la maison abandonnée. À l’ancienne tapisserie posée par les premiers habitants de la maison s’ajoutent désormais les graffiti de ceux qui l’ont temporairement investie. Aussi l’ouvrage devient-il une sorte d’ekphrasis, érigeant la maison abandonnée en œuvre d’art. Les graffiti ne sont alors plus seulement des dégradations, mais deviennent partie prenante de cette œuvre d’art : « l’on distingue juste le sexe de l’homme qui devient une fleur de couleur violente avec des oiseaux dans ses nids ». La destruction à venir de la maison abandonnée est elle-même perçue comme un ultime geste artistique, l’action du « bulldozer » étant comparée au fait d’écraser des « tubes de gouache comme un enfant pressé ».

Couverture de l’ouvrage

Avec les brefs textes de prose qui décrivent la maison abandonnée alternent des poèmes en vers libres, tout aussi brefs, qui paraissent aborder autrement le sujet. Ces poèmes-là nous font quitter le registre de la description, pour se situer davantage du côté de la sensation, du sentiment personnel, de la métaphore. « Une cheminée de brique rose / S’accorde avec le silence. »

Dans l’ensemble, il s’agit d’un ouvrage paisible. La future destruction de cette maison, dont on comprend qu’elle est chère aux yeux de la poète, n’est pas une cause de colère ou d’indignation, ni même de regret. Béatrice Bonhomme jette un regard attendri sur cette maison dont elle sait voir la beauté, là où d’autres ne verraient peut-être qu’une ruine.

10. Variations du visage et de la rose

Couverture de l’ouvrage

Titre : Variations du visage et de la rose
Éditeur : L’Arrière-Pays
Date d’édition : 2013
ISBN : 978-2-910779-61-0
Nombre de pages : 40

Comment commencer autrement qu’en soulignant la beauté de ce titre, avec ses allitérations en [v], en [d], en [r] et en [z] ? Le visage, c’est celui de Mario Villani, le père de la poète. Plus exactement, celui d’un autoportrait de grandes dimensions, à l’entrée de la maison familiale. Et la rose, c’est celle que la famille a posée face au portrait. Une rose qui jamais ne s’est fanée. Ces données, présentées dès le début de l’ouvrage, sont ensuite reprises à travers ce qu’il faut donc appeler des « variations », à savoir trois sections de dix poèmes chacune.

« Il a emporté une rose avec lui et il l’a gardée dans sa main. Quand nous sommes arrivés, le cœur de la rose brûlait encore. »

Béatrice Bonhomme, Variations du visage et de la rose, p. 15.

La rose semble ainsi le symbole d’une vie qui se continue, sous d’autres formes, par-delà la mort. L’incorruptibilité de la rose apparaît comme un miracle, et fait penser à la croyance selon laquelle le corps de certains saints catholiques résisterait à la putréfaction. De même, l’idée selon laquelle « la vie désormais s’est transportée dans le tableau » peut évoquer l’histoire du Portrait de Dorian Grey.

Et la peinture elle-même se continue : « En face du visage est posé un chevalet » (p. 35). Au peintre qui est mort succède un jeune peintre dont tout laisse à penser qu’il s’agit du fils de la poète, Stello, auteur de l’illustration qui ouvre le recueil : « Il s’est installé en face du visage et a peint son premier tableau. » Désormais, il est « l’héritier », le « Chevalier à la rose » (p. 38-39).

11. L’Indien au bouclier

Couverture de l’ouvrage

Titre : L’Indien au bouclier
Éditeur : Collodion
Date d’édition : 2014
Lieu d’impression : Mers-sur-Indre (36)
Nombre de pages : Pages non numérotées
ISBN : 2-906701-89-2

C’est un tout petit ouvrage de quelques pages seulement. Il a été écrit en un seul jour, si l’on en croit la quatrième de couverture, laquelle indique la date du 2 novembre 2013. Ce texte en prose est, là encore, un « livre de deuil ». Béatrice Bonhomme y évoque la vie et la mort de son frère Patrice Villani, décédé le 11 juillet 2013. L’enfance et l’âge adulte s’y télescopent, de même que s’y rencontrent la joie des souvenirs passés et l’horreur de cette nouvelle déchirante — la mort d’un frère.

« Il avait eu le courage de croire à la vie alors que tout lui annonçait sa mort et il n’avait jamais plié. »

Béatrice Bonhomme, L’Indien au bouclier.

12. Dialogue avec l’anonyme

Couverture de l’ouvrage

Titre : Dialogue avec l’anonyme
Éditeur : Collodion
Date d’édition : 2018
Nombre de pages : Pages non numérotées

Ce dernier ouvrage est le plus récent à ce jour dans l’œuvre de Béatrice Bonhomme. Je lui ai consacré un article au moment de sa parution. Aussi me contenterai-je ici d’y renvoyer.

Pour conclure

Ce passage en revue des recueils de Béatrice Bonhomme n’aura pas couvert l’intégralité de son œuvre, mais en offre un bel aperçu. J’ai pris le temps de citer chaque recueil présenté, afin de faire entendre la poésie de Béatrice Bonhomme, qui a su trouver sa « signature poétique », comme on parle de la signature vocale d’un chanteur, marquée par l’alliance de la plus grande nudité avec la plus grande intensité. J’espère sincèrement que cet article aidera à mieux faire connaître cette poésie qui commence à être reconnue, puisque Béatrice Bonhomme s’est vu décerner deux prix de poésie ces dernières années, et qui, incontestablement, gagne à être lue. Vous trouverez, parmi les autres articles de ce blog, une présentation d’autres ouvrages, en particulier de Dialogue avec l’anonyme, le recueil le plus récent à ce jour.


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Image d’en-tête : Pixabay.

12 commentaires sur « Parcours dans la poésie de Béatrice Bonhomme »

  1. Comment te dire, cher Gabriel, à quel point je suis touchée de ce travail que tu as accompli sur mon œuvre! C’est extraordinaire pour moi, qui me suis toujours occupée de l’œuvre des autres poètes.

    Alors Merci infiniment !

    Je t’embrasse

    Béatrice

    J’aime

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