
Manifs, venue du président chinois… Samedi dernier, 23 mars 2019, les rues de Nice étaient presque vides. En revanche, l’auditorium de la Bibliothèque Nucéra était, lui, bien rempli. En effet, le public niçois n’a pas manqué l’occasion d’entendre la lecture-performance de Charles Pennequin.
Une véritable performance
Peut-être d’aucuns craignent-ils de s’ennuyer en assistant à une lecture de poésie. Avec Charles Pennequin, rien à craindre de ce côté-là ! Sa performance est un véritable spectacle, où l’intonation, le débit, le phrasé, ont une grande importance. Les effets sonores que permettent l’enregistrement stimulent l’intérêt.

Certains s’imaginent peut-être aussi la poésie comme un art officiel et ronflant, où l’on se bercerait du retour régulier des rimes, et où l’on s’extasierait confortablement des petites beautés de la vie. Rien à voir, non plus, avec la poésie de Pennequin ! Son accent du Nord, son phrasé populaire (négations à un seul morphème, élisions, apocopes et aphérèses…), la transformation parfois de la voix en bruit, montrent bien que son discours n’a rien d’académique.
Certains s’imaginent peut-être encore la poésie comme un art difficile d’accès, puisant dans un langage suranné, ou au contraire cherchant tellement à tout prix l’innovation qu’il en devient inaccessible. Là encore, Charles Pennequin vous surprendra, par son langage à hauteur d’homme, parlant d’humain à humain.
De l’humain et de l’humour
Peut-être encore certains s’imaginent-ils la poésie comme un art très sérieux, solennel, grave, ne traitant que des sujets les plus respectables, des matières les plus sublimes. Et voilà que Charles Pennequin vous parle d’une invasion de Martiens ! Et il n’est pas rare que le rire saisisse le public.
Et puis, pour parler d’un autre cliché courant à propos de la poésie, peut-être certains se l’imaginent-ils totalement déconnectée des préoccupations réelles de la majorité des hommes. Rien de tel chez Charles Pennequin, dont la poésie a une évidente dimension politique, dans le bon sens de ce terme, c’est-à-dire non dans le sens d’imposer une idéologie, mais de susciter la réflexion par des textes qui nous font réagir, qui nous provoquent sans toutefois nous heurter.
« Allez, on y va, on se révolte… »
Aussi le poète a-t-il provoqué la surprise des usagers de la bibliothèque, en invitant son public à le suivre en dehors de l’auditorium, tandis qu’il poursuivait sa performance au mégaphone, parmi les étudiants qui planchaient sur leurs devoirs. « Allez, on y va, allez, on se révolte… C’est la révolution des pachydermes. » Un tel texte, fustigeant notre passivité, notre immobilisme, ne pouvait laisser indifférent.
Bref, si d’aventure Charles Pennequin passait près de chez vous, je ne peux que vous recommander d’aller l’écouter. Ne serait-ce que pour vérifier que la poésie est vivante, et bien vivante…
POUR EN SAVOIR PLUS…
LE FESTIVAL POËT POËT
Depuis maintenant treize ans, la compagnie « Une petite voix m’a dit » organise chaque année, dans le sillage du Printemps des poètes, un festival de poésie de grande qualité : les Journées Poët Poët. L’objectif est de réconcilier le grand public avec la poésie, en convoquant les arts vivants au sens large. Ce festival ne se déroule pas uniquement à Nice, mais un peu partout dans les Alpes-Maritimes : Mouans-Sartoux, La Gaude, Saorge…
Cette année, Charles Pennequin était le poète qui parrainait le festival. Les années précédentes, cela a été Serge Pey, Jacques Rebotier, Jean-Pierre Verheggen, Marc-Alexandre Oho Bambe, ou encore Valérie Rouzeau.
Vous trouverez sur ce blog de nombreux comptes-rendus des manifestations de cette année et des années précédentes. Je vous invite ainsi à découvrir la belle soirée poétique qui s’est tenue vendredi dernier à La Gaude. Vous trouverez également une interview de Sabine Venaruzzo, organisatrice du festival.

Magnifique. Merci pour cet éclairage qui nous rappelle que la poésie est plus vivante que jamais. Pennequin et le festival Poët-Poêt, c’est forcément vivre la poésie autrement que dans la poussière qu’elle occupe encore dans certains greniers de la mémoire littéraire ou dans de trop nombreuses manifestations où le poète occupe gravement la chaire devant un parterre de convertis affables. C’est aussi aller au contact, à la rue, au plus près des oreilles qui ne s’y attendaient pas, les surprendre, les déranger. Toutefois, il existe de tout jeunes festivals où il n’est même plus question du surplomp ou du « parrainage » d’un auteur comme à Nice, si subversif et respectable soit Pennequin. A Nantes « Partout la Poésie » en est à sa deuxième édition et la poésie c’est celle des habitants, des passants de la rue, leurs mots lus et écrits, la poésie qu’ils aiment qu’ils écrivent, enfants, vieillards, ils viennent la dire, la gueuler, l’essayer à voix haute souvent pour la première fois, sans modèle, sans la performance du professionnel qui a parfois le défaut d’écraser celui qui y assiste et qui perpétue le modèle de l’artiste actif et du spectateur passif. Un effort, et la poésie abolira les barrières créateur/spectateur pour que chacun devienne l’un et l’autre. https://www.facebook.com/pg/Assoannexe/photos/?tab=album&album_id=1951475058295796&__tn__=-UC-R
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Je vous remercie pour ce commentaire et pour cette information qui pourra être utile aux lecteurs.
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