On m’a plusieurs fois demandé de proposer des titres d’ouvrages à lire, qui permettraient aux lecteurs de s’instruire et de se cultiver, sans pour autant que la lecture cesse d’être un plaisir et un divertissement. Permettez-moi donc de vous rassurer d’emblée : la littérature française n’a rien d’ennuyeux ! Je commence aujourd’hui avec quelques titres. N’hésitez pas, bien entendu, à en proposer d’autres en commentaires.
Lire, c’est vivre
A vrai dire, je suis un peu attristé de constater que bien des gens considèrent la littérature comme inaccessible et ennuyeuse, comme une obligation scolaire davantage que comme un moyen de s’enrichir intérieurement, d’élargir ses horizons, d’apporter un surcroît de sens à certaines expériences vécues, et de se délecter du plaisir des mots.
Lire ne s’oppose pas à vivre : il n’y a pas, d’un côté, les rats de bibliothèque qui se contenteraient de vivre par procuration à travers les mots écrits par d’autres, et, d’un autre côté, les jouisseurs de la vie, dont l’existence serait plus palpitante. Bien au contraire, lire augmente le vivre. C’est par un va-et-vient régulier entre les livres et les expériences réelles que l’on comprend mieux tout à la fois sa vie et les livres.
Conformément aux demandes qui m’ont été faites, toutes les propositions ci-dessous relèvent de ce que l’on pourrait appeler, un peu trop pompeusement certes, de grands classiques de la littérature française. Je voudrais cependant préciser qu’il convient de se garder de tout snobisme, et qu’il y a également, dans la littérature dite populaire, de belles trouvailles à faire. Je ne parlerai que d’ouvrages que j’ai lus et aimés. Et présentés dans le désordre.
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Lancelot passant le pont de l’épée (1475). (Source : Wikimedia Commons) Si vous aimez le Moyen-Âge, vous prendrez sans doute du plaisir à redécouvrir la geste arthurienne. Tous les romans de Chrétien de Troyes sont très bien écrits : Lancelot le chevalier à la charrette, Yvain le chevalier au lion, Erec et Enide… Vous en trouverez plusieurs éditions aux traductions différentes. Notez aussi, dans la collection « Bouquins » chez Robert Laffont, le recueil intitulé La légende arthurienne, qui rassemble les aventures du roi Arthur, de Merlin l’Enchanteur, et des chevaliers de la Table Ronde partis en quête du Graal…
- Un roman de Balzac vraiment pas ennuyeux : Les Chouans. Niveau plaisir, vous allez être servis car c’est du 4 en 1 : le roman réunit guerre, espionnage, complot et intrigue amoureuse. Dans le bocage breton (à lui seul un véritable personnage), les Chouans s’opposent à la République. Corentin, émissaire de Fouché, et Marie de Verneuil, espionne infiltrée parmi les royalistes, intriguent tandis que les deux armées s’opposent. Cette dernière ne résistera cependant pas au charme du marquis de Montauran.
- Plus moderne, à l’écriture quasi-cinématographique, l’Espoir de Malraux a été pour moi une belle découverte. Nous sommes en Espagne, à l’époque de la guerre qui oppose les Franquistes et les Républicains. On sait que cette guerre se termina par la victoire des Franquistes qui instaurèrent un régime dictatorial. Mais Malraux arrête son récit avant cette regrettable issue, à un point où tout reste encore possible. Malraux présente une belle galerie de personnages : communistes, anarchistes, chrétiens…
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Jules Verne par Nadar (Wikipédia) Enfin, vous vivrez de très bons moments en ouvrant un Jules Verne. Quel sera votre choix ? L’exploration sous-marine avec Vingt mille lieues sous les mers ? La découverte des profondeurs cachées sous le Sneffels islandais dans Voyage au centre de la terre ? Un Voyage en ballon ? Ou peut-être des titres moins connus ? J’aime particulièrement L’île mystérieuse, où la science fait le salut des naufragés, ou encore Michel Strogoff, qui en plus d’être un roman palpitant est une peinture incroyable de la Sibérie au XIXe siècle. Lisez aussi Le château des Carpathes, ou encore Robur le Conquérant… Quand on pense que Jules Verne n’a jamais voyagé ! Mais il se documentait du mieux qu’il pouvait, et n’hésitait jamais à transmettre ses connaissances à ses lecteurs. Bien sûr, les opinions de l’auteur sont celles d’un homme du dix-neuvième siècle : Jules Verne avait foi dans la science, et, n’ayons pas peur de le dire, adoptait parfois des jugements qui frôlent le racisme. Mais, au moins, il était optimiste et cela change des dystopies d’aujourd’hui !
- J’ai également gardé un fort souvenir du Voyage au bout de la nuit de Céline, tant pour son écriture très travaillée et pour son héros trimballé dans un monde qu’il ne comprend plus. Bardamu dit quelque chose de la condition humaine au XXe siècle : il est ballotté dans la guerre mondiale, dans l’Afrique, dans l’Amérique. A lire, sans pour autant ignorer les positions antisémites de Céline.
- Ah oui ! Lisez Zola. Je sais, ça n’a rien d’original comme proposition, mais franchement, ça vaut le coup. Il faut certes dépasser le cadre d’ensemble, le laïus sur l’hérédité et le fait qu’il veut peindre l’histoire d’une famille de dégénérés. Ses personnages sont en réalité très humains, je pense à Renée de La Curée ou à Nana dans le roman éponyme. Une magnifique peinture de la France sous le Second Empire. Et, au-delà, un style très poétique, bien plus en tout cas que ne le laisse augurer l’idée d’une observation naturaliste du monde.
Ceux qui veulent lire pour se cultiver tout en se divertissant pourront aussi se tourner vers le théâtre. Cela peut être une bonne porte d’entrée dans la littérature française : ce sont des textes qui se lisent nécessairement rapidement (c’est forcément plus court qu’un roman). Il y a, là encore, l’embarras du choix.
Quant à la poésie, c’est vrai que l’abord est moins divertissant, on ne lit pas un poème comme on ouvre un roman d’aventures, mais il faut néanmoins oser en lire, cela vous réconciliera peut-être avec la littérature !
Mais surtout, surtout, ne lisez pas simplement parce qu’il faut avoir lu tel ou tel ouvrage, ou parce que vous ne voulez pas paraître inculte en société. Lisez parce que vous aimez. Certes, le goût se forme : c’est bien pour cela que le premier rôle des professeurs est de faire aimer. Comme en cuisine, il faut avoir goûté avant de dire qu’on n’aime pas. Et certains livres qui vous auront d’abord déplu sauront peut-être vous séduire quelques années plus tard. Laissez-leur une chance !
Merci beaucoup pour vos propositions de livres.
La prochaine fois, vous pourrez nous proposer quelques pièces de théâtre.
Et encore félicitation pour votre blog.
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Merci beaucoup !
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« Lisez parce que vous aimez » : J’ai toujours un format poche dans mon sac et c’est bien agréable dans les salles d’attente…
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Merci pour ce commentaire !
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