Poésie et peinture : les « livres de dialogue »

La présence d’illustrations dans les livres ne date pas d’hier : que l’on songe aux manuscrits enluminés du Moyen Âge pour s’en convaincre. Mais il est une pratique assez particulière, en ce qu’elle relève du dialogue de deux artistes : la création à quatre mains d’un livre par un poète et un artiste plasticien.

Pas de simples illustrations

Parfois appelés « livres d’artistes », ces ouvrages méritent le nom de « livres de dialogue », que leur attribue Yves Peyré. En effet, le travail du plasticien ne se limite pas à une présence décorative venant enjoliver l’œuvre du poète. Le peintre et le poète interviennent d’égal à égal, parfois sur le même espace où texte et image se superposent, parfois sur des pages séparées. C’est parfois le texte qui préexiste et le peintre qui s’en inspire, parfois l’inverse.

Quelques « couples » célèbres

L’un des ouvrages les plus aboutis sur cette question est Peinture et poésie d’Yves Peyré (aux éditions Gallimard). Il s’agit d’un ouvrage de grandes dimensions, où sont reproduites en couleurs de nombreux exemples de ce partage artistique, à travers la collection de la bibliothèque littéraire Jacques Doucet.

La somme d’Yves Peyré permet de se rendre compte que, loin d’être une pratique marginale, de très grands créateurs, peintres et poètes, ont sacrifié à cette pratique du livre de dialogue. Jugez plutôt, à partir de ces quelques exemples glanés en feuilletant l’ouvrage :

  • Edgar Allan Poe, Stéphane Mallarmé et Édouard Manet ;
  • Paul Verlaine et Pierre Bonnard ;
  • Blaise Cendrars et Fernand Léger ;
  • Paul Eluard et Max Ernst ;
  • Tristan Tzara et Hans Arp ;
  • Jacques Dupin et Joan Mirò ;
  • Alain Jouffroy et René Magritte ;
  • Francis Ponge et Jean Fautrier ;
  • Claude Simon et Joan Mirò ;
  • René Char et Alberto Giacometti ;
  • André du Bouchet et Pierre Tal Coat ;
  • E. M. Cioran et Pierre Alechinsky…

Livres rares, livres-objets…

Bref, des artistes très célèbres se sont prêtés à cet exercice du dialogue à deux voix. Pourtant, cette pratique n’est pas très connue : en effet, les « livres de dialogue » ne connaissent généralement pas la même diffusion que des livres de poche… Il s’agit parfois d’exemplaires uniques, parfois de séries limitées à quelques dizaines d’exemplaires.

On notera d’ailleurs que ces « livres » n’ont pas toujours la forme d’un livre au sens traditionnel. J’en ai déjà vu en forme d’éventail ou de rouleau, par exemple. Leur place est alors peut-être davantage dans une vitrine que sur le rayonnage d’une étagère.


(Image d’en-tête : La bibliothèque de livres anciens du Trinity College à Dublin, Nic McPhee, Wikimedia Commons, libre de réutilisation)

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